coma idyllique (marco)

les heures défilent et l'euphorie meurt à petits feux pour laisser place à la fatigue. les gens partent, d'autres s'endorment n'importe où, et y'a ceux qui restent, ceux qui ne tombent pas aussi rapidement et qui continuent de prolonger leur gaieté à coups de grandes doses d'alcool. le regard vide, bouffée par la fatigue qui l'a gagnée, thelma se décide à abandonner. de toute façon, la seule personne un minimum intéressante à ses yeux encore debout, c'est gabriel, et elle le voit bien qu'il essaie de mettre cette fille dans son lit depuis des heures. un travail de longue haleine, faut croire. elle traine son corps jusqu'à sa chambre, mais grimace en sentant une odeur forte. et elle regrette vraiment de ne pas avoir verrouillé sa chambre, en reconnaissant la petite flaque de vomi dans le lit. pas franchement motivée à laver cette nuit, elle traine les pieds dans la chambre de louise. manque de bol, louise est avec quelqu'un. elle traverse l'appartement, puis le couloir, et dieu merci la porte du second appartement n'est pas verrouillée. nouvel essai, la chambre de marco, plongée dans le noir. il doit dormir, elle se dit. elle se laisse tomber sur le lit à ses côtés, n'ayant plus vraiment la force d'aller chercher un lit ailleurs. "je croyais que t'étais endormi" elle dit, finalement, lorsqu'elle capte qu'il a les yeux ouverts.

marco a la gueule qui tourne plus vite que les planètes. la fatigue du boulot avait fini par le rattraper, et il n'avait pas survécu à son dernier verre de whisky. la soirée avait eu raison de lui, la quasi totalité de ses potes avait fini par pécho quelqu'un, et marco s'était retrouvé en tête à tête avec une meuf reloue et même pas belle, qui lui racontait sa vie sans prendre le temps de respirer entre deux phrases. bloqué. il pouvait pas en placer une, alors marco tirait gentiment sur sa clope en faisant mine d'écouter cette diarrhée auditive. au bout de dix minutes de monologue, il a réussi à glisser un "ok" furtif entre deux mots, et à se barrer comme si on l'appelait à l'autre bout de la pièce. drapeau blanc, abandon. marco est sorti de là, les pieds presque devant, mort de sa soirée. il est aller s'étaler dans son lit. la chambre plongé dans la pénombre, le plafond noirci par la nuit, marco trouve pas le sommeil. il a du resté dans l'appart d’à côté. soupir. marco prend son téléphone, rafraichit les réseaux au moins 10 fois sans rien y trouver d’intéressant. il laisse tomber son tel sur le sol et passe ses deux mains derrière sa tête en guise d'oreiller. on en est là et quand il ferme les yeux, ça tourne plus que jamais. marco se laisse divaguer. dans un demi-sommeil (ou un demi coma-ethylique), il entend la porte. ses yeux s'ouvrent, une ombre fluette approche et tombe à ses côtés. c'est thelma. marco la regarde et reste silencieux. dans sa tête sa commence à chavirer, une sensation étrange parcours son dos. ça faisait un moment qu'il ne s'était pas retrouver à deux, seuls. « je croyais que t'étais endormi » marco secoue la tête lentement et reporte ses yeux sur la plafond. « je l'étais à moitié, je crois. » un silence s'installe beaucoup trop vite. il a qu'une envie c'est qu'elle se blottisse, il veut la sentir tout prêt sa thelma. la raison revient au galop, il veut plus s'emballer marco, parce qu'il a compris à demi mot que c'était surement pas la peine. ou du moins, il essaye de se dire ça pour avoir une réponse aux milles questions qui passent dans sa tête. « tu dors là ? le gars que t'as serré ce soir dors dans ton lit et ronfle trop fort ? » marco affiche un sourire taquin, interroge thelma du regard. reproche à demi mot. il feint de chercher l'aveu, en vérité il veut être rassuré, il prie pour ne pas s'énerver encore à l'imaginer dans les bras d'un gars comme ça. après tout, il ne l'a presque pas vu cette nuit.

elle fait la moue un instant en entendant la réponse de marco, marmonne un vague désolée, parce qu'elle ne voulait pas le tirer de son début de sommeil, dans le fond. l'esprit apaisé par l'alcool, la fatigue, ou bien les deux, c'est bien dans ces rares occasions que le silence lui paraît acceptable. pas de pensées intrusives qui l'envahissent et la bouffent toute entière, rien, le calme. jusqu'à ce que marco la questionne. elle fronce un peu les sourcils, se retourne vers lui. "pas de ... attends" souvenir éclair, qui la frappe, d'un coup, et elle se revoit envoyer un message à un type y'a quelques heures, parce qu'elle avait vite compris que, ce soir, aucun feeling avec personne, et aucune envie d'essayer. adepte de la facilité, envoyer un message et demander de passer à un type qui semblait être intéressé lui paraissait beaucoup moins contraignant. elle sort son portable, et le nombre de messages non lus lui confirment ses soupçons. "j'ai merdé je crois" elle soupire en faisant défiler les messages, comprend que le pauvre garçon s'est bien ramené en bas de l'immeuble, a patienté, avant de déclarer forfait et d'aller voir ailleurs. elle grimace en lisant le dernier message, particulièrement plus virulent, incline l'écran en direction de marco. "j'imagine que c'est peu probable qu'il me recontacte maintenant" elle finit par déduire. "tu comptes pas me virer de ton lit, quand même?" elle demande, pour finir. yeux rivés sur marco, dieu sait qu'elle ne compte pas bouger d'un poil, elle.

elle ne lui donne pas tord, thelma, au final. alors le visage de marco se crispe déjà. marco se referme et commence à serrer les dents, de jalousie surement. la lumière artificielle du téléphone l'aveugle presque. il ferme les yeux, mais ça tourne encore beaucoup trop pour pouvoir sombrer dans le sommeil. elle incline l'écran vers lui, sa rétine brûle. il lit en diagonale. ça ne le fait ni rire, ni pleurer. ça le saoule. elle le saoule. « j'imagine que c'est peu probable qu'il me recontacte maintenant » "c'pas plus mal", qu'il pense. elle lui demande s'il compte la virer de son lit. marco hausse les épaules en baillant. franchement, lui faire la guerre serait trop fatiguant. et surement inefficace. il se redresse et sort du lit, attrape ses clopes par terre et en tire une du paquet. il s'approche de la fenêtre, l'ouvre, et allume sa cancéreuse. il sait pas trop quoi dire à son invitée de fortune marco. il a toujours la mâchoire serrée. ses pensées sont fluctuantes, embrumés par l'alcool et la fume. il soupire. il se demande pourquoi il est jaloux marco. après tout, il ne l'aime pas toujours thelma. il ne la connaissais pas tant que ça, la fuyante, toujours dans les bras d'un autre. jamais une confession, jamais une conversation sérieuse. une amitié édulcoré, ou une intimité timide. quelques gestes tendres, rien de plus, jamais. marco laisse son silence pesant s'installer dans la pièce. c'était sa seule arme, ce silence, et ça à chaque fois sans que jamais thelma n'y comprenne rien. marco s'occupe l'esprit en regardant les lumières de la rue, les gens qui trainent encore. il lui pardonnera surement, comme à chaque fois, et sera le premier à la serrer dans ses bras quand elle reviendra vers lui, innocente. au final, marco et le gars des sms étaient dans le même bateau. celui que thelma s'amuse à faire couler.

elle ne sait pas à quoi elle s'attendait, comme réaction. peut-être un rire léger, comme un pote, un simple colocataire comme il est supposé être. ou alors une phrase un peu moralisatrice, saupoudrée d'un soupçon de reproche, quelque chose qui indique un intérêt, malgré tout. mais pas le vide intersidéral, pas l'ignorance. ni un haussement d'épaule, désinvolte. rien à foutre, rien à foutre, rien à foutre. "je peux pas bouger. trop fatiguée". elle ajoute, en fermant les yeux, un instant. qu'il comprenne bien qu'elle compte aller nul part. par flemme, parce que son corps, cette coquille vide, lui semble être de plus en plus engourdi. et par envie de rester avec lui, aussi, profiter de l'instant où sa tête a quitté le navire pour laisser carte blanche au cœur. ses yeux s'écarquillent subitement quand elle sent marco se redresser. elle s'imagine déjà qu'il va s'échapper et filer entre ses doigts, aussi brutalement que ça. la fenêtre s'ouvre, et elle comprend que son stupide cœur s'est, une nouvelle fois, emballé pour peu de choses. tout va bien. non. tout va mal. le silence est devenu lourdement pesant, et les angoisses retrouvent le chemin. elle n'aurait pas du venir, elle n'est pas la bienvenue, elle le dérange. il voulait dormir. il ne voulait pas d'elle du tout. ou c'est la lumière de son portable, qu'elle aurait du baisser, qui a provoqué ce changement d'ambiance. elle a fait trop de bruit en rentrant dans sa chambre, aussi, et aurait du faire plus attention en ouvrant la porte. incapable de prendre des précautions, stupide. elle n'aurait pas du lui montrer les messages, avec l'autre garçon. ce n'était pas un détail amusant, simplement une anecdote profondément ennuyante sur sa vie. ou ses pensées auraient du se concentrer sur lui, sur marco, et pas dévier vers l'autre. mais, ça, c'est pas sa faute, c'est l'alcool, sans doute, qui aggrave ses difficultés à maintenir son attention quelque part. elle tourne dans le lit, tête posée contre l'oreiller. elle rêverait que le matelas l'engloutisse toute entière et la fasse disparaître. les lèvres serrées et les yeux rougis, elle oublie un instant sa gorge qui se noue, et ses yeux se posent à nouveau sur marco. "t'as bientôt fini ta cigarette?" elle demande, plus doucement, priant tous les seigneurs de l'univers pour qu'il lui réponde, et qu'il revienne à ses côtés, surtout.

marco fait la gueule comme un gamin à qui on a refusé un biscuit. et pourtant ça lui parait beaucoup plus compliqué que ça. et avec l'alcool dans son sang (ou le sang dans son alcool, à cette heure là on ne sait plus trop), il n'arrive à rien expliquer du tout. c'est la détresse aussi bien dans sa tête de con que dans son cœur d’artichaut, alors il fait comme l'huitre, la moule ou n'importe quel autre coquillages : il se referme bien nerveusement. « t'as bientôt fini ta cigarette? » il l'entend à peine. « non. » mais les dieux, eux, ont entendus la prière de thelma. c'est une réponse tranchante, instantanée, glacée qu'il lui balance à la gueule. un non qui sonne comme un "tais-toi" ou comme un "qu'est ce que ça peut te foutre". c'est son cerveau qui s'est mit en mode défense automatique, qui veut plus rien savoir, tendis que ses yeux vitreux guettent la rue en bas en tachant d'y trouver le salut. c'est son téléphone à lui qui réussi à le sortir de là. il vibre sur le sol, à côté du lit. marco abandonne la rue de la paix et regarde le nom qui s'affiche sur l'écran. c'est son ex. "elles ont toutes décidé de me casser les couilles ce soir ou c'est comment." qu'il pense. flashback d'il y a trente seconde. un demi regret se niche dans le ventre du marco. il se dit qu'il a peut être répondu trop vite, été trop cinglant. il tourne la langue sept fois dans sa bouche avant de parler, sans réussir à cacher son air saoulé. « pourquoi ? tu veux la fin ? » il tente un sourire sans même y arriver. marco il est naze pour faire semblant. surtout avec thelma. à chaque fois qu'il la regarde, l'intégralité de son corps se braque, prêt à prendre des coups au coeur. marco revient et se penche pour ramasser son téléphone. il se demande s'il doit rappeler. la réponse est sûrement non.

thelma, elle aimerait bien reprendre le contrôle, rien qu'un petit peu, de son corps et de sa tête. elle aimerait bien ne pas dramatiser stupidement, ou ne pas être impactée, comme marco. à ses yeux, il a l'air d'aller. elle commence par sa respiration, et elle se dit que c'est dingue, quand même, d'avoir autant de difficulté à rendre ses inspirations plus amples, plus calmes. rien que ça. mais, elle prend des risques et lui pose une question, où elle espérait sous-entendre qu'elle veut qu'il revienne. un mot, trois minuscules lettres, et cette impression de froid, d'un coup, comme un hiver glacial en plein été. marco ne lui a jamais semblé être aussi loin d'elle. la frustration qui monte, le peu d'effort qu'elle faisait pour un quelconque contrôle, voué au néant. à quoi bon, elle pense, lorsqu'elle sent son cœur qui s'active à nouveau à une allure folle, prêt à tout brûler, là, tout de suite. ça tape, dans ses tempes et elle s'en arracherait les cheveux. il revient près d'elle, marco, mais il a quelques minutes de retard. et elle l'a bien vu, qu'il n'est pas exactement revenu pour elle. c'est ce nom sur son portable qui l'a intéressé. elle se redresse sur le lit, regain d'énergie soudain, même si la pièce semble tourner encore un peu, légèrement. ses mains essuient rapidement ses yeux un peu humides, parce que, putain, rien ne se déroule comme elle veut, parce que, ça la saoule, à elle, d'être sensible comme ça. elle pose les pieds au sol. son regard assassin revient sur marco. "arrête de faire semblant, d'accord? tu veux pas de moi, dis le, ce sera plus simple pour nous deux, je comprends, je vais te rendre service et aller voir ailleurs " elle se rend à l'évidence, elle est de trop. elle lui en veut un peu, de ne pas faire plus d'effort que ça. "de toute façon, t'as reçu un message, vu l'heure, j'imagine que tu vas être occupé" le vomi de paroles commence sans qu'elle ne puisse franchement arrêter. elle la perçoit, thelma, cette fille, lionne en cage, qui s'active, qui parle trop fort, d'une voix trop sèche, tranchante. "putain, j'ai l'impression que tu veux toujours gâcher chaque joli moment qu'on peut avoir" inconsciemment, elle change de stratégie et accuse marco de tous les torts. c'est mieux que de se lamenter sur la nullité qu'elle est. elle préfère la colère à la mélancolie, ça lui semble clairement moins douloureux de faire de marco son bourreau. elle trouve enfin son portable, et ses doigts agrippent la fin de cigarette que marco avait gardé entre ses lèvres, sans ménagement. "ouais, je prends ça." elle répond, avec un grand retard, coinçant la cigarette entre ses lèvres. et sa main attrape aussi le paquet qui traîne par terre, "tu me dois des clopes" elle enchaîne les phrases, certaines qui deviennent un peu moins rationnelles avec l'alcool. elle se dirige vers la porte en inhalant la fumée, s'arrête. "putain mais c'est des mentholées? c'est comme tes foutus pizzas à l'ananas, comment c'est possible d'avoir des goûts aussi merdiques"

Spoiler:

marco entend thelma se redresser sur le lit. il lève les yeux de son écran et croise son regard noir. il ressert les dents marco pour s'éviter de sortir trop de connerie, sa mâchoire devient saillante alors qu'il sent ses tempes qui bourdonnent. et lorsque que thelma ouvre la bouche, ce n'est pas sa voix douce qu'il aime tant qui vient remplir la pièce. sa belle devient véhémente, les reproches gagnent du terrain, la jalousie s'invite, et tout part à la renverse. marco souffle, ses points se serrent, ses yeux emplies de hainamour reste figés sur thelma. et pourtant il ne la regarde pas, il ne voit que du rouge, du noir, de la passion, de la douleur, de la colère, de la frustration. marco repose sa cigarette entre ses lèvres, tire dessus comme un charretier, comme si se gaver de goudron pourrait l'aider à crever plus vite. genre maintenant, c'était le bon moment. le venin de thelma coule dans ses veines, son sang est brulant, son coeur à vif. l’alcool aide à supporter la douleur. thelma vient lui tirer la cancéreuse des lèvres. ça n'arrange rien, vraiment. marco se retourne. il ne veut pas craquer. il ne veut pas taper dans les murs. il ne veut pas tout balancer par terre, tout retourner jusqu'à l'épuisement. il mord son poing pour s'éviter tout ça. pour éviter le spectacle effrayant de la perte de contrôle. elle peut tout prendre si elle veut, marco n'entend qu'à moitié thelma. et c'est la parole de trop, le reproche un peu merdique, sur la pizza à l'ananas et les clopes mentholées, c'est ça qui fait tout exploser. il se retourne vers elle. c'est à son tour de gueuler. elle ne la connu que renfermé, silencieux dans sa colère. alors cette nuit, sa voix se fait beaucoup plus forte qu'il ne l'aurait voulu, l’alcool ayant abattu les murs qu’il se force d’ordinaire à entretenir. et il lui crie dessus. « putain mais ferme ta grande gueule thelma. tu me casses les couilles à sucer tout sf, c'est toi qui flingue tous nos moments avec tes histoires de pute. toujours à t'faire tringler par un bâtard, tu me casses les couilles à jouer la salope. et quand ça va plus tu viens te reposer avec moi, moi qui suis toujours là, à jouer les gentils. mais moi aussi j'ai envie d'te baiser thelma tu vois ? alors il faut que je fasse quoi ? on arrête les calins et j'te cale un doigt direct ? parce que visiblement c'est comme ça que ça s'passe avec les autres mecs nan ? mais DÉGAGE thelma putain DÉGAGE ! CASSE TOI ! » la violence à pris le dessus, y'a plus d'amour, y'a plus de tendresse, y'a que la rage qui hurle. pour la première fois devant elle, pour la première fois autre part qu'à copen'. marco il a le souffle court, le coeur au bord des lèvres, et la main qui désigne la porte pour que thelma se casse le plus vite possible de là. il voudrait ne plus jamais la voir. là où ena réussissait l'exploit de le garder calme, thelma avait sût avec une facilité déconcertante le rendre fou.

y'a cette petite voix dans sa tête qui lui répète en boucle "tais toi, tais toi, tais toi", l'impression de se voir foncer droit dans un mur, d'appuyer avec désespoir sur la pédale de frein pour éviter l'impact, mais ça n'y change rien, aucune possibilité de contrôle. l'impuissance totale, sur sa voix, ses mots, ses réactions physiologiques. et l'impact arrive inévitablement, quand c'est marco qui déraille à son tour. et quel impact spectaculaire, inattendu. bien sûr qu'elle s'attendait à sortir de la pièce un peu cabossée, thelma, avec des blessures superficielles, que quelques pansements suffisent à camoufler. elle ne s'attendait pas à un crash aussi violent. elle se dit que c'est terminé, qu'elle ne va pas s'en sortir vivante, qu'elle ne peut pas. ses yeux s'écarquillent, sa bouche s'entre-ouvre, laissant tomber la fin de cigarette au sol. dieu sait qu'elle ne s'attendait pas à ça, à ces mots durs, sales, dégradants. elle pouvait s'attendre à ce genre de mots de n'importe qui, n'importe quel garçon, mais pas de marco. depuis tout ce temps, tous ces efforts à se protéger, à construire et fortifier un immense mur imaginaire entre son cœur et le reste, tous ces efforts pour rien. parce que maintenant, c'est marco, avec ses mots qui font comme des coups de massue, qui détruit ce mur. c'en est même triste de voir qu'il le fait avec une facilité et une vitesse déconcertante. en quelques secondes, tout tombe. et après ce mur, il ne reste que son cœur pour prendre les coups. un mot, un coup, une larme qui coule. inconsciemment, elle a compris thelma que son acharnement à maintenir le contrôle est inutile, elle est résignée, accepte d'être purement impuissante face à marco, cette nuit. elle est pas encore en état d'analyser son discours, d'assimiler toutes les informations une à une et de comprendre les choses, les comprendre réellement. encore moins en état de les accepter, pour sûr. y'a que les mots répugnants qui tournent en boucle dans sa tête, qui vont laisser une trace qu'elle n'arrivera pas à effacer, même avec tous les efforts du monde. les poings serrés, les ongles qui s'enfoncent dans sa chair dans une main et détruisent le paquet de cigarettes dans l'autre, elle reste muette. y'a cette boule dans sa gorge qui l'empêche de formuler quoi que ce soit. le marco qu'elle a en face d'elle, c'est pas celui qu'elle aime. marco dangereux, marco qui fait foutrement mal. marco qui la brise. elle aimerait pouvoir lui rétorquer quelque chose, rien qu'un mot, un seul. un mot qui, parfaitement choisi, suffirait à retourner la situation. qu'elle puisse le briser, elle, et pas l'inverse. quelque chose comme ça. mais faut croire que la douleur l'en empêche. la petite voix qui revient dans sa tête, et qui lui hurle "casse toi, casse toi, casse toi". casse toi pour survivre. elle l'écoute thelma, parce qu'elle avait la sensation de ne plus pouvoir respirer, ici, de suffoquer. elle se dirige dans l'autre appartement, trace directement dans la chambre de louise, la douce louise, tant pis pour le garçon qui partageait son lit, elle lui somme de partir, et dieu merci louise comprend que c'est la seule chose à faire.

sa vision est brouillée, sa tête est encombrée, ses pensées sont teintés de noir et tambourinent dans sa boite crânienne. et son cœur, pour maintenir le corps à flot, bat à mille à l'heure dans la cage thoracique qui peine à le contenir. c'est de pire en pire, au fur et à mesure qu'elle ne bouge pas thelma, prostrée devant lui entre la peur et la souffrance. marco devrait réagir aux larmes sur la joue, à ses points qui se serrent, à sa bouche qui voudrait crier mais dont rien ne sort. mais marco est devenu aveugle. la colère l'empêche de voir ce qui pourrait l'affaiblir. alors chez lui rien ne change. et thelma finit par comprendre qu'il faut fuir ce monstre qui se dresse devant elle. elle disparait en un instant. marco l'entend qui s'éloigne, jusqu'à ce que la distance étouffe ses pas. à cet instant précis, calme plat. la mer se fait d'huile après le raz de marée. marco reprend ses esprits. c'est effrayant cette sensation, l'impression de revenir à la réalité en une fraction de seconde, c'est si brutale. il se mord la lèvre. il tente de se remémoré ce moment. mais c'est flou, incertain. ne lui reviennent que les mots violents qu'il lui a crier au visage sans ménagement. il se laisse tomber sur son lit, s'assoit, la tête dans ses mains pour contenir des larmes de faiblesse. il est de ceux à qui on a appris à ne jamais pleurer. même dans un état second, à cinq heure du matin, le cœur en lambeau et la terreur au ventre, le contrôle de soi était toujours de mise. il parvient à garder ses yeux à peine humides, il ravale sa colère au plus profond de lui. ses mains essuient son visage fatigué, viennent se rejoindre en prière devant ses lèvres alors qu'il regarde la nuit par la fenêtre. la fatigue sera clémente ce soir. elle l'emportera avant qu'il comprenne son erreur. mais le réveil n'en sera que plus douloureux. il venait briser une chose incroyablement fragile, impossible à réparer.

» MARCO SOLO
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